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Abolir la société

La plupart des anars s’accrochent à l’idée de créer une société «nouvelle» ou «libre». Mais bien peu d’entre eux osent remettre en cause l’idée même de société.

Le concept de société est amorphe, vague — et surtout beaucoup plus difficile à appréhender que ces manifestations institutionnelles comme l’État, le gouvernement, l’Église, la famille, le capitalisme et ainsi de suite. Il est si enraciné dans notre psyché que le remettre en question nous donne l’impression de remettre en cause notre propre nature. «L’Homme est un animal social», disait Platon; si on enlève le social, il ne reste plus que l’animal… Or, c’est précisément pour cette raison qu’il faut selon moi remettre cette idée en question; se libérer des carcans identitaires et des rôles préconçus qui répriment nos désirs peut très bien exiger non seulement la transformation de la société, mais son abolition pure et simple.

Par société, j’entends le même phénomène qui a été conceptualisé par la sociologie et l’anthropologie, c’est-à-dire l’ensemble des individus entre lesquels s’établissent des relations durables, réglées par des lois et des codes de conduite. J’entends ce tout supérieur à la somme de ses parties, à l’ensemble de tous ces individus qui se trouvent perpétuellement en situation de dépendance mutuelle — autrement dit, d’êtres qui ne peuvent être complets en eux-mêmes. La société, c’est un système de relations entre des êtres qui agissent (ou qui sont considérés) comme des acteurs jouant un rôle dans le but de reproduire le système et de se reproduire eux-mêmes en tant qu’individus sociaux.

La dépendance sociale est à distinguer de la dépendance biologique — celle des enfants, en particulier. La dépendance biologique de l’enfant cesse lorsque celui-ci a acquis la mobilité et la coordination psychomotrice, vers l’âge de cinq ans pour la plupart des individus. Pendant ces cinq années cruciales, les relations sociales au sein de la famille agissent pour réprimer les désirs de l’enfant, pour lui instiller la peur du monde et étouffer son individualité libre et créatrice sous les couches et les couches de blindage et ainsi faire de lui un individu social, un être dépendant qui n’a d’autre horizon que de frotter à ses semblables jusqu’au dégoût, jusqu’à la nausée, jusqu’au bout de la haine. Toutes les relations sociales ont comme base cette incomplétude originelle créée par la répression de nos passions et de nos désirs; elles sont nées de notre besoin des autres, pas de notre désir des autres. Nous nous utilisons les uns les autres en tissant des liens qui sont inévitablement, à un degré ou à un autre, des relations hiérarchiques, des relations de maître et d’esclave condamnées à devenir conflictuelles, voire violentes, et surtout gouvernées par le ressentiment. Comment ne pas mépriser ceux que l’on utilise et haïr ceux qui nous dominent?

La société ne peut exister sans les rôles sociaux — voilà pourquoi la famille et une forme ou une autre d’éducation-dressage sont des éléments essentiels de toute société. L’individu social n’assume pas un rôle unique, mais agrège plusieurs rôles qui créent ce fameux blindage trop souvent confondu avec la personnalité. Autrement dit, les rôles sociaux sont la façon dont les individus sont définis par le système de relations qu’est la société dans le but d’assurer sa reproduction. Ils rendent les individus socialement utiles en les rendant prévisibles, en définissant leur comportement selon les besoins de la société. Le principal rôle social est le travail, pris au sens large de l’activité qui permet la reproduction du cycle de production et de consommation. Bref, la société est la domestication de l’humain, la transformation d’êtres sauvages, créatifs et libidineux qui savent interagir avec leurs semblables selon leurs propres désirs en être difformes et déformés qui se manipulent désespérément les uns les autres dans l’espoir de combler l’abîme sans fond de leurs besoins affectifs tout en ne réussissant qu’à assurer la pérennité des besoins et des relations qui les entretiennent.

Les individus libres n’ont aucun intérêt pour les rôles sociaux et les évitent comme de la peste. Pour eux, les relations prévisibles et prédéterminées sont ennuyeuses et ne méritent aucunement d’être reproduites. Il faut admettre que les rôles sociaux offrent de la sécurité, de la stabilité, un peu de chaleur (de tiédeur, plutôt!)… mais à quel prix! Les individus libres souhaitent plutôt entrer en relation avec leurs semblables selon leurs propres termes, en suivant leurs propres désirs, en s’ouvrant à toutes les possibilités offertes par le déferlement incontrôlé de leurs passions. Ce genre de vie ne peut se trouver qu’à l’extérieur de toute société, dans un espace exempt de rôles sociaux par nature délétères.

La société offre la sécurité, mais elle le fait en éradiquant le risque qui est essentiel au jeu et à l’aventure. La société offre la survie, mais exige en retour notre vie — car la survie qu’elle a à offrir est une survie en tant qu’individu social, en tant qu’êtres constitués de rôles sociaux, en tant qu’être aliénés de leurs passions et de leurs désirs. Une survie de junkies accros à des relations qui jamais ne peut les satisfaire.

Un monde fait de relations désirées entre individus libres serait un monde libéré de la société. Toutes les interactions humaines seraient déterminées immédiatement par les individus désirant entrant en relation et non par les nécessités d’un système social. Dans un tel monde, nous aurions tendance à nous émouvoir, à nous émerveiller, à nous enrager mutuellement, à vivre passionnément plutôt que de n’expérimenter que l’ennui, la complaisance, le dégoût ou la sécurité. Chaque rencontre serait potentiellement une aventure, une aventure qui ne peut pleinement exister où la rencontre se fait presque uniquement selon les diktats des relations sociales.

Voilà pourquoi il faut choisir de lutter pour abolir la société, plutôt que de faire la révolution — même la sociale.

La lutte pour transformer la société a toujours été une lutte pour le pouvoir, parce que le but est de prendre le contrôle du système de relations de la société — un objectif irréaliste puisque ce système est hors du contrôle de quiconque y est intégré. Par définition, la lutte pour changer la société ne peut être une lutte individuelle. Elle demande une action de masse ou de classe. Dans ce cadre, les individus doivent impérativement se définir eux-mêmes comme des êtres sociaux et supprimer leurs propres désirs, du moins ceux qui ne sont pas compatibles avec l’intérêt supérieur de la transformation sociale.

La lutte pour abolir la société est une lutte pour abolir le pouvoir. C’est une lutte d’individus désirant vivre une vie libérée des rôles sociaux et de leurs contraintes, désireux de vivre passionnément leurs désirs, de vivre tout ce que leur esprit indomptable peur imaginer. Évidemment, les projets collectifs ne sont pas exclus de cette lutte, bien au contraire, mais ils naissent de la conjonction des désirs individuels et se dissolvent au besoin, dès qu’ils se raidissent, dès qu’ils semblent se transformer en relation sociale. La voie de cette lutte ne peut être cartographiée, ne peut être tracée à l’avance, car elle naît de la confrontation des désirs d’individus libres avec les exigences de la société. Cela n’enlève toutefois pas l’utilité d’analyser comment la société nous modèle et d’essayer comprendre les raisons des échecs et des succès des révoltes du passé.

Les tactiques employées contre la société sont aussi nombreuses que les individus révoltés, mais elles partagent toutes l’objectif de saper le contrôle et le conditionnement social, de libérer les désirs et les passions individuels. L’humour, le jeu et l’incertitude sont essentiels, se combinant dans un chaos dionysiaque. Jouer avec les rôles sociaux de façon à les subvertir et ainsi les rendre inutiles à la société, les renverser de pied en cap, les réduire à l’état de simples jouets sont toutes des pratiques louables. Mais plus fondamentalement, il faut confronter la société à l’intérieur de nous-mêmes, avec nos propres désirs et passions, avec la saine et héroïque attitude de celui ou celle qui ne s’abandonnera pas à ses conditionnements, qui ne centrera jamais ses activités autour d’eux et qui est résolu a vivre selon ses propres termes.

La société n’est pas une force neutre. Les relations sociales n’existent que par la suppression des désirs et des passions réels des individus, par la répression de tout ce qui permet les libres relations humaines. La société est la domestication, la transformation des individus en objets utilitaires et la transformation du jeu en travail.

La rencontre libre d’individus refusant et luttant contre leur propre domestication sape toute société et ouvre l’avenir à tous les possibles.

Catégories :Accès de rage

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Anne Archet

Héroïne sans emploi, pétroleuse nymphomane, Pr0nographe lubrique, anarcho-verbicruciste, poétesse de ses fesses, Gîtînoise terroriste (et menteuse, par dessus le marché). Si j'étais vous, je me méfierais, car elle mord jusqu'au sang.

33 réponses

  1. Oulala
    Quand Anne Archet fricotte avec Zerzan, Sade, Nietzche et Stirner c’est la quinte flush!

    contre Platon tu nous dis donc :
    Enleve le social, il reste l’animal

    Alors l’animal, il n’est pas forcement social, on n’est bien d’accord, chez les pieuvres par exemple c’est chacun pour sa gueule, la petite pieuvre, extremement intelligente et debrouillarde s’auto-eduque et est parfaitement autonome des sa naissance jusqu’au moment de sa vie ou elle est blessee par exemple, la ses copines pieuvres n’hesite pas une seconde elle la cannibalise directement.

    Mais chez pas mal de mammiferes pas trop servis par la Nature en capacite de predation ou d’auto-defense, c’est une autre histoire, celle de l’evolution d’organismes vers une vie en groupe, en troupeau, en tribus et meme en meutes…avec rapports d’interdependance a la clef…et transmission culturelle de techniques de survie….

    Moi j’appelle ca la Societe animale, intrinseque a la condition humaine et a notre de condition de primate…

    Je sais Anne, c’est tres dur de vivre parmi les singes, surtout s’ils vivent sur la branche superieure et n’ont de cesse que de faire bien sentir leurs dejections abusant hierarchiquement des lois de la gravite ( quoique parfois les odeurs remontent aussi ) mais le seul probleme c’est que toute seule dans la jungle ou sur la banquise, et sans les outils de cultures typiques des societes animales, tu ne survivras pas plus de deux jours, sans compter l’impossibilite de te reproduire ( et oui a deux c’est deja la societe… )

    Alors la solitude et l’homme face a la nature, c’est bien gentil maus un tantinet romantique, tout comme notre image de l’animal tient plus des prejuges chretiens ( La Beeeeeeete ), hobbiens ( un loup pour l’homme ) voire nietzscheen ( la volonte de puissance ) que d’une quelconque realite

    Alors comme dirais l’autre, faut faire avec meme si ils puent et surtout lave toi les mains !
    Et ta liberte passionnelle ( que romantisme ! ) dans tout ca, elle n’est plus que relative. et conditionelle…

    Mais vu qu’il existe differents types de societes et de cultures animales, la il y du boulot pour les anars comme pour les autres, lesquels peuvent toujours tenter en groupe, comme indivuellement de changer la donne sociale si c’est leur vocation et si bon leur semble… mais pour ce qui est de contrer les resultats de l’evolution biologique, c’est pas gagne a mon avis, on pourrait commencer maintenant on verra bien le resultat dans deux milliards d’annees!

  2. A propos, l’homme est un animal social, c’est pas plutot Aristote ???

    Celle la va te plaire :
    L’homme est un animal social qui deteste ses pairs ( Eugene Delacroix )

  3. Depuis des dizaines d’années l’état et ses différentes administration se sont fixés le but de « tisser le lien social ». J’ai toujours eu du mal à comprendre ce que cela signifie et pourquoi cela semble voué à l’échec. Le social (les universitaires parlent sociétal) échappe-t-il à son administration. Votre réflexion est peut-être un début de réponse.

  4. Incroyable. Non seulement faut-il éliminer la moralité mais aussi la société complète! Et elle nie toujours être nihiliste?? C’est vraiment de la folie furieuse.

  5. Oui c’est la première fois que je rencontre une « anar »… car cette espèce n’a en fait qu’un spécimen!

    Une seule question: comment proposez-vous d’abolir la société et de libérer les désirs individuels sans structure contenant des rôles sociaux? Ce que vous prêchez ne peut mener à la fin des rôles sociaux, mais plutôt la création de nouveaux rôles sociaux. Ce que vous voulez, ce sont des relations sociales tellement libérées qu’elles flottent dans l’éther, sans relation avec toutes les demandes de la vie humaine.

    Il n’y a donc que deux options pour accomplir votre but: soit la désintégration totale ou une éradication des besoins humains, nous laissant libres d’interagir comme nous le voulons, sans compromis ou limites. C’est tout à fait impossible.

    Vos articles sont intéressants et profonds mais les principes et valeurs qui les sous-tendent sont superficiels. Vous êtes une écrivaine, pas une penseuse.

  6. C’est ce que je pensais: de nous deux, l’ignorant, c’est vous. Vous ne connaissez essentiellement que votre tendance idéologique et je soupçonne que vous n’avez pas beaucoup lu à l’extérieur du cursus anarchiste classique. Et encore: il se trouve que l’individualisme est une tendance importante de l’anarchisme! Le fait que vous pensiez que j’en suis le seul épigone illustre bien que vous devriez être un peu plus curieux intellectuellement.

    Si vous l’étiez, vous auriez lu sur les seules vraies expériences anarchistes de l’histoire humaine — celles des peuples dits primitifs. Il se trouve que l’humanité a passé la majeure partie de son existence dans un état assimilable à l’anarchie… à l’anarchie telle que je la décris, du moins, pas la vôtre. Je ne suis pas primitiviste car je ne préconise pas un retour au paléolithique; mais une chose est certaine: 90% de notre existence en tant qu’espèce s’est déroulée sans institution de contôle social, sans état, sans chefs, sans flics, sans propriété, sans travail, monnaie, sans échanges, sans société telle qu’on l’entend couramment, même. Ne pas s’en inspirer et surtout ne pas comprendre qu’une vie en commun telle que je la décris est possible, voilà ce que j’appelle être perdu dans les limbes de l’idéologie.

    Le seul exemple de société mutuelliste se trouve dans la tête des mutuellistes. Dans ces conditions, je me demande qui est réaliste et qui est rêveur.

    Ce n’est pas parce que je ne suis pas une constructrice de systèmes utopiques que je ne pense pas. Car c’est précisément ce que vous faites: vous élaborez un plan pour la société en espérant qu’elle s’y conforme. Le problème, c’est que la réalité est plutôt rétive et accepte de mauvaise grâce de se laisser caser dans les petites boîtes que l’on construit dans notre tête.

    Je ne dis pas que ce n’est pas utile d’explorer de nouvelles façons de vivre, bien au contraire. Je crois toutefois qu’il faut les vivre, tout de suite, sans attendre; libérer des espaces et des temps — ce que Deleuze et Guattari appelaient la ligne de fuite. C’est au niveau individuel, moléculaire, que ça doit se produire. Il faut trouver les failles du système, s’y installer et les agrandir, comme un coin de métal dans un mur.

    Si ça se trouve, je suis pas mal plus pragmatique qu’anarcho-prag. Et si je peux me permettre, plus anarchiste que vous, François.

  7. «une vie en commun telle que je la décris est possible»

    Où as tu décrit cette vie? Tu me sembles être resté très vague dans tes idées. Et si on parle de vie en commun, on ne parle pas ici de société? Sous une autre forme, peut-être, mais une société quand même.

    Tu n’es pas obligé de répondre à mon commentaire (qui se retrouve sous le texte précédent celui-ci), mais je crois que tu serais bien embêtée d’y répondre.

    Et en quoi diffère tu des primitivistes?

    Et à la limite, je l’admet, les primitivistes remettent la civilisation et toute forme de technologie en question, mais pas la société à ce que je sache.

    Et quand tu parles de vie en commun, selon moi: vie en commun= société.

  8. En bref, ce que nous propose l’anarcho-individualiste qui desire egalement l’abolition de la societe ( ce qui est parfaitement coherent n’en deplaise a certains ), c’est la loi de la jungle ( ultra -pragmatisme?) ou autrement dit : l’Anomie…
    Ce qui signifierai donc que l’anarcho-individualiste, s’il est bien un anarchiste dans ses vues et dans ses luttes et cela ne souffre pas le moindre doute, n’a par contre pas du tout pour projet l’Anarchie ( organisation de la societe sur des bases libertaires, egalitaires et solidaires ), mais les luttes anarchistes ne constituent pour lui qu’une phase transitoire a l’etablissement de l’Anomie…
    Exact Anne???

  9. Est-ce la societe, ou est-ce plutot le caractere « sacré » de la societe que vous combattez-ici, ou bien est-ce la religion de la societe, ou la societe comme religion ou croyance?
    Est-ce le caractere proto-fasciste inscrit et constituant l’essence de toute societe que vous denoncez ici ?
    Et pour etre clair, est-ce l’a-nomie ou bien l’auto-nomie que vous pronez finalement?

  10. Je loue la grande qualité argumentative de ce billet. Je trouve que les idées sont exposées de façon concise et claire.

    Madame Archet réfléchit sur une façon de vivre qui est complètement différente de celle à laquelle nous sommes habitués. On nous a enseigné, répété, faire croire que la société est nécessaire à l’être humain. Que l’on devait réprimer ses désirs pour vivre en commun. Une telle pensée, si elle est intéressante, est quand même différente du discours philosophique et social habituel.

    Néanmoins, il y a quelque chose qui m’agace dans cette réflexion. Madame Archet parle (dans son commentaire plus haut) des peuples primitifs qui vivaient dans un état assimilable à l’anarchie. Je me demande si cette conception des peuples primitifs est vraiment réelle et si elle n’est pas plutôt un mythe, assimilable, en partie, au thème du « bon sauvage ».

    Les peuples primitifs ne partageaient-ils pas des rituels, des croyances religieuses, populaires, des mythes sur la fondation du monde, etc. qui tendaient à souder le groupe ensemble, à une certaine fusion collective ? J’ai beaucoup de mal à croire qu’il puisse y avoir eu des « individus » libres dans de tels peuples. Ne sommes-nous pas plutôt en train de projeter une sorte d’absence de civilisation idéale (sans État, sans chefs, sans échanges [vraiment?]) sur ces peuples primitifs ?

  11. Ce n’est pas un mal que d’avoir des croyances — je vois mal comment on peut ne pas en avoir.

    Je n’ai jamais dit que les peuples primitifs étaient parfaits ou qu’il fallait reproduire leur mode de vie. Je ne fais que dire que leur expérience de vie, qui est durable, montre la possibilité de vivre sans États, sans chefs et oui, sans échanges (car ce qu’on appelle « commerce » pour eux était basé sur le don).

    Je ne crois pas qu’il y ait de société idéale, comme l’indique le titre de ce texte.

  12. « Si ça se trouve, je suis pas mal plus pragmatique qu’anarcho-prag. »

    Possible. Je ne prétends pas avoir le monopole du pragmatisme. :) Et vous l’êtes certainement beaucoup plus que la moyenne des anarchistes du Québec!

    « Et si je peux me permettre, plus anarchiste que vous, François. »

    Je n’en suis pas sûr. Par contre, il est vrai que vous l’êtes depuis beaucoup plus longtemps que nous.

  13. Il n’y a pas plus collectiviste que la tribu! L’Individu n’y existe meme pas, car il n’est qu’une partie de la tribu, et son etre lui appartient. Si par malheur pour lui il se dissociait par son comportement des interets vitaux de la tribu, on lui signifiera gentiment mais fermement qu’il prenne le chemin de l’exil, ce qui signifie, dans la jungle, sur la banquise comme dans le desert la mort a plus ou moins breve echeance…
    L’argument « primitiviste » ne tient guere dans ses conditions pour qui souhaite exister en tant qu’individu…
    Faire la critique de la sacro-sainte croyance en la societe peut etre fort utile a tout individu pour se constituer en tant que tel car apres tout:
    Est-ce que la Societe existe ?
    Si oui, est elle necessaire ?
    On est en droit de douter sur tous ces points!
    On peut aujourd’hui etudier la Sociologie comme la Theologie
    sans croire ni en Dieu ni en la Societe.
    Mais n’etudier les phenomenes humains uniquement par l’etude du comportement des masses ne saurait guere nous renseigner sur ceux et celles qui les composent…
    Vivement la creation d’une premiere chaire en Individuologie***, seul moyen effectif de contrebalancer l’un des effets de la croyance totemique en l’existence de la societe, dont la Science dite sociale semble etre l’Eglise helas…
    Et meme lorsque l’on etudiera l’individu, et par consequent son champ d’autonomie, personne non plus ne sera tenu de croire a son existence….

    ***Avec A.A comme professeur honoraire bien entendu

  14. A.A. a dit à F. Tremblay: « Vous ne connaissez essentiellement que votre tendance idéologique et je soupçonne que vous n’avez pas beaucoup lu à l’extérieur du cursus anarchiste classique. »

    Socrate dit à ses élèves (avant de les mettre): « Le sage sait qu’il ne sait rien. »

    Moi non plus, je n’ai rien lu, même pas le cursus classique des anarchistes. Les livres d’idéologie, je chie dedans, et ça augmente leur valeur. Vous pourrez peut-être dire que c’est barbare, intellophobe ou simplement niais; mais je suis comme tout le monde, et j’ai peu envie de me polluer le cerveau des miasmes mentaux de certain-e-s philosophes qui construisent la Vérité au lieu de La déconstruire. En admettant que je sois « anar », je le suis parce que l’autorité me fait dégueuler, pas parce que je bande en lisant Bakounine. Alors s’il-vous-plaît, au lieu de vous plaindre que telle personne n’a pas lu telle lettre envoyée le 2.2.1905 par Rosa Luxembourg à Machin, expliquez-vous.

    Je vous conseille fortement, Anne, d’entrer en contact directement avec les sources premières sur les peuples primitifs, sans passer par les idéologues. (Vous l’avez fait?) Toute personne réellement pragmatique aime voir les choses avec ses propres yeux.

    to Pragma/atos –> la chose.

  15. « C’est ce que je pensais: de nous deux, l’ignorant, c’est vous. Vous ne connaissez essentiellement que votre tendance idéologique et je soupçonne que vous n’avez pas beaucoup lu à l’extérieur du cursus anarchiste classique. »

    En fait, je n’ai RIEN lu du « cursus anarchiste classique. » En fait, pas encore. Je n’ai lu que deux livres mutualistes et deux livres d’anarchie de marché. Mais je lis et je parle à des gens de toute tendance.

    « Et encore: il se trouve que l’individualisme est une tendance importante de l’anarchisme! Le fait que vous pensiez que j’en suis le seul épigone illustre bien que vous devriez être un peu plus curieux intellectuellement. »

    Non, je connais les anarchistes individualistes, mais vous n’êtes définitivement pas un de ceux-là.

    « Si vous l’étiez, vous auriez lu sur les seules vraies expériences anarchistes de l’histoire humaine — celles des peuples dits primitifs. »

    Tout à fait impossible, en fait aucun « peuple primitif » n’a été anarchiste, excepté peut-être par accident. Encore une fois, vous délirez! Le fait qu’un peuple n’a pas de gouvernement ne le rends pas anarchiste!

    « Je ne suis pas primitiviste car je ne préconise pas un retour au paléolithique; mais une chose est certaine: 90% de notre existence en tant qu’espèce s’est déroulée sans institution de contôle social, sans état, sans chefs, sans flics, sans propriété, sans travail, monnaie, sans échanges, sans société telle qu’on l’entend couramment, même. »

    Ah oui? Combien d’oeuvres sur la sociologie primitive avez-vous lu?

    « Ne pas s’en inspirer et surtout ne pas comprendre qu’une vie en commun telle que je la décris est possible, voilà ce que j’appelle être perdu dans les limbes de l’idéologie. »

    Non, c’est vous qui êtes perdue dans le délire. Rien de tel n’a jamais existé ou ne pourrait exister. La vie que vous décrivez est celle de l’atomiste, de l’anomiste, pas celle de l’individualiste.

    « Le seul exemple de société mutuelliste se trouve dans la tête des mutuellistes. »

    Oui, mais au moins on a des exemples d’organisations qui ont marché et marchent. Et notre position fait beaucoup plus de sens!

    « Car c’est précisément ce que vous faites: vous élaborez un plan pour la société en espérant qu’elle s’y conforme. »

    Faux. Je n’ai aucun « plan pour la société » après le rétablissement de la liberté. Aucun Anarchiste ne peut, par définition, avoir un « plan pour la société »- sinon il se contredit. L’Anarchiste veut établir une société libre de s’auto-réguler, rien de plus.

    « Et si je peux me permettre, plus anarchiste que vous, François. »

    « Plus anarchiste? » Est-ce que c’est comme être « plus enceinte »? Sérieusement, je ne pensais pas que vous traitiez notre discussion comme un jeu. Je ne suis pas intéressé aux imbéciles comme vous qui traitent tout argument comme une compétition pour battre son prochain. Jouez votre petit jeu sans moi.

  16. François, cette fois-ci ton dernier commentaire est plus intéressant sur le fond. Cependant, l’individualisme stirnérien est bel et bien une forme de pensée anarchiste.

    Mais de dire « Jouez votre petit jeu sans moi. », là je ne suis pas d’accord. Et je ne crois pas qu’elle est une imbécile même si elle est dure avec toi.

  17. Le petit jeu, c’est vous qui l’avez commencé, François, en me traitant d’ignorante et en montant tout de suite sur vos grands chevaux. Je ne fait que vous répondre. C’est vous qui avez déterminé le niveau (médiocre) du débat.

    Quand j’ai dit que je suis plus anarchiste que vous, c’est doublement une boutade parce que:

    1. Je n’aime pas les étiquettes et surtout celles qui finissent en « iste ».
    2. Vous me refusiez ladite étiquette.

    Ceci étant dit, vous exprimez beaucoup d’attachement à un tas d’institutions très autoritaires, ce qui tempère sérieusement votre anarchisme. En soi, ce n’est pas un mal et si je refusais de fréquenter tous ceux et celles qui on ce travers, je resterais vachement seule. Mais que cet attachement vous donne l’autorité morale de donner des leçons de réalisme ou de sagesse, là, ça me fait un peu rigoler. Surtout que vous me servez les arguments que des étatistes et autres autoritaires vous ont déjà servi vous-même….

    Je ne veux pas faire de concours de lecture — because c’est partuculièrement stupide. Mais une chose est certaine, c’est utile de lire, beaucoup, et surtout hors de ses affinités intellectuelles. Ça permet de mettre un tas de trucs en perspective. Et de se rendre compte lorsque les gens qui pensent comme nous disent des niaiseries. Il se trouve que j’ai lu beaucoup d’essais anthropologiques sur le paléolithique — des trucs universitaires, pas militants pour un sou. Et pour ce que l’on en sait, les sociétés dites primitives étaient anarchistes. Pas parfaites: anarchistes. On n’y travaillait peu, ou pas du tout. Les institutions de domination sociale y étaient inexistantes. Ça ne veut pas dire qu’il faut singer les primitifs, seulement apprendre de leur expérience.

    Si l’anarchie est possible — dans le sens de réalisable — dans ce cas tout est une question de désir. Et il se trouve que je ne désire aucunement vivre dans une société mutuelliste. Je n’ai aucune envie de passer ma vie à assister à des réunions, à gérer des banques du peuples et des sociétés de crédit mutuel. Je n’ai aucune envie d’avoir à calculer la valeur en matières premières et en heures de travail de mes possessions pour m’assurer d’en avoir assez pour survivre. Je n’ai aucune envie de me faire imposer des tâches par rotation. Et je n’ai aucune envie de me plier à la volonté démocratique, même si elle est industrielle.

    Le fait est que je risque, dans un système mutuelliste, de me retrouver avec le même rôle social que dans notre société capitaliste actuelle: celui de la paria, de la marginale, de la rebelle. Et ce, seulement parce que je souhaite vivre selon mes propres désirs.

    J’oubliais l’anomie. Ce terme me fait bien rire: c’est le lapin qui sort du chapeau de l’anarchiste. « Ne dites pas que l’anarchie c’est le chaos… nous ne préconisons pas l’anomie… et patati et patata ». Lorsque (certains) anarchistes parlent d’anomie, ils décrivent un désordre bien particulier, celui qui advient lorsque plusieurs pouvoirs sont en lutte pour l’hégémonie; pas celui généré par une absence totale d’institutions de domination. La fameuse anomie est toujours un désordre créé, entretenu et maintenu par des dispositifs de pouvoir. Je peine a trouver un seul exemple historique d’anomie créé par l’élimination de ces dispositifs de pouvoir. Alors rangez-moi cet épouvantail au plus vite.

    Oh, et cessez de dire que ce que vous proposez est plus sensé et sérieux que ce que je raconte. La plupart du temps, ce sont les réformistes qui sont les plus irréalistes, parce qu’ils s’imaginent qu’il y a quelque chose à sauver dans l’ordre des choses. Votre projet (très complexe) d’échange mutuel réglé par des sociétés de crédit, par son maintien du marché, de la propriété (quoique vous en dites) et de la démocratie, EST réformiste. D’une certaine manière, vous êtes aussi réformiste qu’un social-démocrate — dans dans l’autre sens.

  18. En tout cas, Kevin Carson, un mutaliste contemporain, ne considère pas que le mutualisme est une tendance réformiste:

    « Mutualism is not « reformist, » as that term is used pejoratively by more militant anarchists. Nor is it necessarily pacifistic, although many mutualists are indeed pacifists. The proper definition of reformism should hinge, not on the means we use to build a new society or on the speed with which we move, but on the nature of our final goal. A person who is satisfied with a kinder, gentler version of capitalism or statism, that is still recognizable as state capitalism, is a reformist. A person who seeks to eliminate state capitalism and replace it with something entirely different, no matter how gradually, is not a reformist.

    http://www.mutualist.org/

  19. @Anne Archet

    « Et il se trouve que je ne désire aucunement vivre dans une société mutuelliste. »

    Moi non plus, mais ce n’est qu’UNE façon de vivre l’anarchie parmi tant d’autres, mais ça ne veut pas dire que la pensée mutuelliste est invalide. Je ne vois pas comment une anarchie pourrait forcer les gens à tous vivre sous le credo mutuelliste. Mais je ne vois pas tellement d’oppression dans le mutuellisme, beaucoup moins que dans certaines tendances dits anarcho-capitalistes ou anarcho-communistes, en fait!

    « Et pour ce que l’on en sait, les sociétés dites primitives étaient anarchistes. Pas parfaites: anarchistes. On n’y travaillait peu, ou pas du tout. Les institutions de domination sociale y étaient inexistantes. Ça ne veut pas dire qu’il faut singer les primitifs, seulement apprendre de leur expérience. »

    Je suis d’accord sur ce point.

  20. Je ne suis pas intéressé à continuer ce jeu de « one-upmanship. » Amusez-vous vous-même.

    Tout ce que je dirai, c’est que je continuerai à lire vos articles parce qu’ils sont excellents. Tant qu’à votre capacité de raisonner… on en reparlera.

  21. Moi aussi j’ai déjà idéalisé les sociétés primitives. Mais quand on gratte un peu, on se rend compte qu’il y avait des inégalités:

    http://lhomme.revues.org/index6470.html#compterendu-6470

    Moi aussi je veux me débarasser de l’État, mais pas de la société (selon moi c’est impossible et qu’on me démontre le contraire et je pourrai pt changer d’idée). D’ailleurs je ne suis pas certain de quoi vous parlez de toute façon. On parle ici de société primitive selon moi, car ces peuples vivaient en communauté. Donc abscence d’État oui, abscence de société non.

    Je me suis intéressé aux Dogons et aux sociétés sans État (malheureusement mon cours était centré sur les Dogons et nous n’avons pas assez abordé ce sujet pourtant vachement intéressant) et bien qu’il y avait des point postififs et il y en avait d’autres bcp plus négatifs. Société sans État ne signifie pas qu’il n’y a pas de chefs (chef de tribus selon l’âge par exemple) ou d’inégalités.

    Je pourrais pt citer des passages si vous voulez, mais je préfère pour l’instant boire du vin et ne pas fournir l’effort.

  22. Parmi les peuples dits primitifs, j’ai surtout lu sur les Hurons et les Iroquois, et je suis d’accord que les rôles, sexuels par exemple, étaient souvent plus stricts, sur certains aspects, que chez les Européens de la même époque. Par contre, étant donné la popularité dont jouissaient les Amérindiens auprès des Européens (non seulement l’élite, mais aussi le peuple, qui souvent engagé dans l’armée et affecté en Nouvelle-France, désertait parfois massivement pour aller s’assimiler dans des villages autochtones), on peut peut-être comprendre l’intérêt d’observer les caractéristiques de la vie chez les peuples dits primitifs, par ailleurs tous différents.

    Sur le plan des sociétés chronologiquement plus reculées encore, Smail dit (dans On Deep History and the Brain) que les communautés du paléolithique empêchaient la domination d’individus sur le groupe en se liguant temporairement mais systématiquement contre le/la leader en ascension, ce qui les ramenait toujours dans un certain état d’égalité-liberté. Il cite quelqu’un d’autre dont j’ai oublié le nom. Je ne connais pas non plus les sources premières qui lui ont permis de parvenir à cette conclusion, mais je doute que ce soit les Dogons.

    ***

    Je pense que Anne Archet, même dans son monde idéal, trouverait encore le moyen de passer pour une paria.

  23. One more time:

    Les societes primitives sont collectivistes, et souvent hierarchisees. Pas de gouvernement certes, mais bien des chefs ou groupes exercant leurs domination.

    L’individu n’y existe pas, il est simplement biologiquement un organisme qui se plie a la volonte du dominant (voir Frodo, Loups), d’un groupe dominant (femelles Bonobo). S’il ne le fait pas, il subit directement des violences, est tue ou directement expulse.

    Si maintenant vous voulez parler des clans et tribus, meme scenario. L’etre ne s’y appartient pas , il appartient au clan et le clan a le pouvoir de decider de tout ce qui concerne l’individu, comme le droit de prendre sa vie*.

    Par consequent je doute que de par le passe, l’autonomie reelle de l’individu est jamais existe dans un contexte social, sauf peut-etre dans le cas de certains dictateurs parvenus a subjuguer temporairement l’ensemble des etres et structures de leur epoque.

    Les luttes anarchistes restent des luttes pour le maintien l’emancipation et l’autonomie de l’individu. En groupe comme individuelles.
    Dans la societe fasciste ( certains considerent cela comme un pleonasme ) l’individu n’a pas sa place.
    Dans la societe stalinienne, l’individu n’a pas sa place.
    Dans la societe monarchiste, un seul individu a sa place.
    Dans la societe oligarchique, seuls quelques rares individus ont leur place.
    Dans la societe segregationiste, seuls les membres d’une race
    Dans la societe sexiste, seuls les individus d’un sexe ont leur place.
    Dans la societe theocratique, seuls les pretres ont leur place.
    Dans la societe de caste, seuls ceux issus de la cate superieure ont leur place.
    Dans la societe de specialisation du travail personne n’est autonome.
    Dans la societe democratique, personne n’est autonome, chaqu’un se soumet a la loi de la majorite.
    Dans la societe bourgeoise, seuls les proprietaires ont leur place.
    M’entendez-vous bien? Dans aucun de ces contextes, societes dites « primitives » ou dites « avancees » l’individu ne peut vivre et exister de maniere autonome, a moins d’etre traite tel un criminel ou un renegat et prive materiellement du peu d’autonomie qui lui reste.

    En ce sens il est parfaitement legitime d’interroger le concept de societe comme s’opposant au plein epanouissement de l’individu, legitime de contester la croyance en la societe ( est-ce qu’elle existe???), et encore plus legitime de saper la religion de la societe, le tabou ultime consistant a considerer la societe comme une religion !!!

    Quoiqu’il en soit, l’individu ne peut se constituer tant qu’il ne saura pas quels sont ses choix propres, et ceux qui lui viennent des autres, dont la societe….

    Dilemne, hors societe, l’individu ne survit pas.

    Que nous reste-t-il ? Nous battre pour notre individualite et notre autonomie, au sein de la societe. C’est l’action directe. contre les pouvoirs, tous les pouvoirs. Et si nous pouvons nous en permettre le luxe et nous sommes altruistes ( ce qui n’est pas une necessite ( La liberte commence la ou commence celle des autres pour certains), rendre a d’autre possible les conditions d’epanouissement de leur individu et de leur autonomie…par tous les moyens.

    Mais attention , meme cette lutte la, peut-etre au detriment de votre autonomie….

    En bref, lutter, en bon individu, pour soi, et indirectement pour les autres, pour une societe plus libertaire, plus egalitaire et plus solidaire me semble la seule issue possible car je ne crois pas personellement a la survie hors du groupe.

    Pour certains, Individu et Societe sont simplement incompatibles et antinomiques. Ils ont peut etre raison. dans ce cas il n’y a aucune issue. L’individu ne se realisera nu hors groupe, ni dans le groupe.

    J’aimerais leur rappeler que la notion d’individu, apparue tres tardivement dans l’histoire de l’humanite, est nee au sein du groupe! Et que la societe libertaire , egalitaire et solidaire ( fraternelle c’est une autre histoire!) ou l’individu pourra s’epanouir pleinement n’est pas encore realisee!
    Elle existe parfois, cette zonne d’autonomie, entre quelques etres, de maniere temporaire….

    Alors pourquoi vouloir voir en un paleolithique suppose la solution ou un modele qui n’y a jamais existe…Un acre desespere???..
    Alors que rien, non absolument rien ne prouve pour l’instant que la zone d’autonomie permanente ne soit impossible…

    Alors plutot
    Que d’en rever
    A en crever,
    Et plutot que d’attendre,
    Nous n’avons plus qu’a y tendre!

    *Vous constaterez que les societes etats-uniennes et chinoises sont donc des societes primitives puisqu’ elles condamnent toujours a mort…

  24. mais la société, c’est pas 2 individus, à la base ?
    et s’ils s’entendent pas, comment on fait ? la question ne devrait même pas être posée. pourtant, elle se pose. et sans question, il n’y a plus d’aventure, mais la réponse elle-même deviendrait un début de société. alors comment on fait ? moi, je me dis que quand je lis, c’est pour essayer de comprendre, tout en oubliant la base… alors que l’essentiel semble résider dedans. disons pour résumer, qu’entre le début et la fin, il y a l’aventure, qui est une société. évidemment, c’est théorique, c’est tout. la vie, c’est le mouvement de la société aventureuse. nous, ou soi, ou nous autres. eux. s’il n’y avait pas de société, il n’y aurait pas de mouvement anarchiste. (pause vodka). la société, c’est l’absurde se remettant en question… nosotros. el pueblo, unido, jamas sera vencido, par exemple… dantec disait que che guevarra était contre le rock n roll. j’en sais rien. pas vérifié ses sources. je pense à Albatross de P.I.L., le premier morceau de Metal Box. un mélange de baudelaire et de voix pourrie, désespérée… c’est nul à côté d’une petite fille qui pleure, et à qui on essaie d’expliquer qu’il faut reprendre espoir dans la vie, quand on a a pas pour soi. j’aime bien « interdit d’interdire », comme slogan. il se comprend bien lui-même. (j’espère). reste l’aventure de la société.
    « il faudrait parvenir à un coeur clarifié »… c’est de houellelbecq, sur son cd que j’écoutais beaucoup en 2001. me sens seul, anne. tu voudrais pas être ma maman ? des fois, la société, ça devient un individu qui se dédouble dans un miroir brisé. reste le souvenir de vrais yeux dans lesquels s’abbreuver. en espérant crever avant que n’aie lieu la dernière mutation. parce que ça serait trop con. bisous.

  25. La première source de fascisme « consentant », c’est le couple.

    Tout le monde se fait piéger là-dedans.

    De voir les oncles et tantes s’emmerder royalement, s’engueuler comme des caves, se chier dessus à qui mieux mieux j’ai la même réflexion que vous.

    Je mets par le fait même en doute les statistiques merdiques sur le fait que le couple prolonge la durée de vie des individus. Il la prolonge certes mais au prix d’une vie de condamné à mort.

    Le couple est le fondement de notre platitude sociale, de notre apathie, de notre profond désintéressement dans la vie, dans l’aventure, dans les choses excitantes de la vie.

    Salutations et excellent article portant à réfléchir.

  26. Petite question,

    « Jouer avec les rôles sociaux de façon à les subvertir et ainsi les rendre inutiles à la société, les renverser de pied en cap, les réduire à l’état de simples jouets sont toutes des pratiques louables. »

    Est-ce que l’infidélité dans le couple peut être l’une de ces pratiques « louables »?

  27. Une société cornue, trompeuse, faschisante, stérilisante, tendancieuse, infantilisante, amorphe et quoi encore! lessivante, blanchissante, impersonnelle… mais qui s’autorise une telle remise en question; pas mal, tout de même.
    Elle aura tout de même le mérite d’être réelle.

    Attendez-moi un instant, je crois que j’ai du cordage, du carton, une toile, deux trois épingles; je me fabrique des ailes et je vous rejoint. Gardez-moi une place, que diable!

  28. Bonjour Anne,
    Je découvre votre blog (via Anarcho-prag), dont je rattrape la lecture des articles par ordre chronologique.

    Ce que vous écrivez me plait beaucoup ; c’est très passionnel et très spontané (en tout cas c’est l’impression que ça donne), mais c’est à chaque fois très juste. Par contre, je suis étonné des commentaires assez virulents que cette justesse passionnelle suscite ; mais après tout, ça n’est, somme toute, et me semble-t-il, qu’une banale cristallisation de la véhémence habituelle causée par des défauts de langage et d’expression ; en clair, je suis toujours attristé de voir combien les gens peuvent s’engueuler aussi véhément à cause de l’utilisation de tel ou tel mot qu’ils n’entendent pas de la même manière, sans chercher à comprendre le sens essentiel d’un texte, alors que bien souvent ils seraient d’accord sur le fond, tout en l’exprimant différemment.

    Pour moi, ce mépris (au sens ‘erreur’, bien sûr) vient, dans cet article précis, de l’utilisation malencontreuse que vous faites du terme « société », ainsi que de celui de « relation sociale ». Comprenez-moi bien : je suis parfaitement d’accord avec ce que vous dites dans ce texte, je suis moi aussi un individualiste, mais je crois que vous faites erreur uniquement sur la définition et le sens de certains mots, ce qui amène cette méprise, à mon sens injustifiée.

    Vous critiquez ce que vous appelez la société, alors qu’il me semble que ce que vous voudriez critiquer, c’est la transcendance de la société sur l’individu ; la primauté de celle-ci sur l’individu ; ce sont toutes les idéologies quelconques qui considèrent le bien commun, le bien social, comme supérieur au bien individuel ; la raison sociale comme supérieure à la raison individuelle ; et qui réclament d’une manière ou d’une autre la subordination de l’individu à ces soi-disant intérêts collectifs. Et lorsque vous critiquez les relations sociales, en fait vous voudriez critiquer les relations préétablies dans lesquelles nous avons été élevés, cette identité et ces codes sociaux ou moraux qui nous ont été inculqués, ces relations superficielles régies par des codes, des généralités ou des symboles, que nous avons beaucoup de mal à dépasser, car ils rythment notre vie en nous en assurant une certaine sécurité.

    Vous avez mille fois raison lorsque vous dites qu’il faut libérer notre individualité de tous ces rapports sociaux inutiles. Et même de tous les rapports sociaux qui nous précèdent. C’est en cela que nous devenons adultes : lorsque nous devenons capables de remettre en cause tout ce qui nous a socialement construit, afin ensuite de reconstruire si besoin des rapports sociaux tels qu’ils nous sont individuellement bénéfiques, des rapports sociaux qui « naissent uniquement de la conjonction des désirs individuels », comme vous le dites si bien, et qui se dissolvent dès qu’ils ne correspondent plus à ces désirs individuels. La révolution est à faire en nous, en quittant l’intérêt collectif et les généralités préétablies qui nous ont construits, pour nous construire librement à la place, dans une relation libre, en face et avec nos congénères, et non pas dans une lutte pour l’appropriation du pouvoir. Et cette révolution doit être constante, perpétuelle, et inlassablement re-déclenchée.

    Mais lorsque vous prenez exemple sur les tribus pour parler d’individus libres, ce n’est qu’à moitié vrai. Certes les primitifs étaient bien plus libres que nous, car moins dépendants de la technique, et de la dépendance économique et sociale que celle-ci implique, et certes leurs relations sociales s’exerçaient dans un cercle plus restreint, ce qui leur permettait de lutter plus facilement pour leur liberté individuelle que nous ne le pouvons dans nos états actuels immenses, mais toutefois, une tribu est une société, qui a sa propre identité, ses propres codes sociaux, son lot de relations hiérarchiques et de commérages. Une société qui a ses échanges économiques (car le don, s’il n’est pas du commerce, est une forme d’échange économique), sa propriété, en général commune, son travail, souvent lui aussi collectif, et même avec un état, au sens premier du terme, c’est-à-dire au sens de territoire commun à une population, et géré collectivement, que ce soit par une chefferie, par une démocratie, ou par une toute autre organisation politique. Le principal atout des sociétés tribales, à mon sens, c’est leur incroyable diversité, l’infinie possibilité d’organisations sociales différentes qu’elles représentent, comparée à notre société mondialisée et qui sombre dans la monoculture. Mais ce n’est pas leur « anarchie », car cela n’est pas vrai ; pas si vous l’entendez dans un sens de non existence d’une identité, d’un territoire, d’un peuple, et d’échanges économiques entre les individus de ce peuple. Peut-être était-ce vrai dans certaines, mais ça n’était pas le cas dans la grande majorité d’entre elles. Car même dans les sociétés tribales, les individus sont enchaînés par leurs codes sociaux, et très peu sont ceux qui font « leur propre révolution sociale ».

    Je pense tout comme vous que les nouvelles façons de vivre doivent être immédiatement vécues. Je suis mutuelliste, mais si je suis mutuelliste, ce n’est pas dans une volonté de prise de pouvoir, ni révolutionnaire ni réformiste, c’est dans une mise en application immédiate de modèles sociaux qui me semblent les plus individuellement bénéfiques ; directement, par un système qui assure ma pérennité, et indirectement, en assurant la complémentarité de ma propre activité avec celle des personnes qui seraient en accord avec moi, et qui voudraient échanger avec moi, selon ces mêmes valeurs. Le mutuellisme peut tout à fait être vu comme une forme de rapports sociaux individuellement bénéfiques, et qui naissent de la conjonction des désirs individuels. C’est une forme que non seulement, pour ma part, je conceptualise, mais qu’en plus j’expérimente au jour le jour. En « trouvant les failles du système », en « s’y installant et en les agrandissant, comme un coin de métal dans un mur ».

    Mais le seul moyen de supprimer totalement la société et les rapports sociaux serait de se rendre totalement autonome, or, cette démarche, si elle est louable, est assez idéale, car il y a trop longtemps que nous sommes dépendants des autres et de ce que nous pouvons échanger avec eux, tant psychiquement qu’économiquement, pour pouvoir réellement et totalement nous en passer. J’en sais quelque chose, car je suis justement depuis plusieurs années dans une démarche d’autonomisation économique individuelle, et depuis peu collective. Et à chaque fois qu’il y a échange, il y a rapport social. A chaque fois que nous devons échanger, nous devons nous accorder sur des valeurs, et donc nous créons une identité, une micro-société. Ceci n’est donc pas un problème en soi ; le problème n’est pas la société ; ce qui est le problème, (et c’est aussi, je crois, ce que vous vouliez exprimer dans cet article), c’est que les individus ne soient pas, chacun, individuellement, les libres créateurs de ces identités et de ces rapports sociaux mouvants et évolutifs ; mais qu’à la place, ils se contentent de subir les rapports sociaux préétablis et transmis, qu’ils s’y bornent comme à des valeurs universelles et immuables, voire transcendantes et conditionnantes. Nous devons comprendre que la société n’est qu’un concept qui est défini a posteriori par nos échanges, lesquels, puisqu’ils résultent d’individus libres et autodéterminés, ne seront jamais immuables et moraux, ils ne seront que le résultat de la rencontre contingente et des choix tout aussi contingents et libres des individus.

    Bravo en tout cas pour votre blog, tout aussi impertinent que perspicace, et dont je vais ardemment poursuivre la lecture.

  29. Si vous ne l’avez pas déjà entendue, voici une émission à réécouter absolument à ce sujet, et qui devrait beaucoup vous intéresser, à propos des indiens kogis :
    http://terreaterre.ww7.be/la-relation-homme-nature-2.html
    Du coup, ça me permet aussi de vous dire, en passant, que ma pensée a évolué, et que désormais je vous rejoins sur l’idée du caractère anarchiste, et même individualiste, de ce type de société (dans le sens où l’intérêt de chaque individu est pris en compte séparément, et la recherche du consensus permanente).

  30. Salut anne. je me souviens d’avoir lu cet article il y a deux étés et il me semblait vraiment définitif. Bcp de choses se passent toujours en deux ans et maintenant que je le relis je me demande « mais à quoi pensais-je a ce moment-là? ». Il reste très lucide en pas mal de passages mais voilà ce que je trouve quelque peu naïf et problématique:

    « réprimer les désirs de l’enfant, pour lui instiller la peur du monde et étouffer son individualité libre et créatrice »; « Toutes les relations sociales ont comme base cette incomplétude originelle créée par la répression de nos passions et de nos désirs »; « êtres sauvages, créatifs et libidineux qui savent interagir avec leurs semblables selon leurs propres désirs »

    Je trouve un peu troublant l’abolition d’une société au nom des concepts issus de cette meme société-lá. Ou plutôt ce qui me gêne ce que l’on définisse d’une manière absolue ce qui est l’être humain, que l’on le voit comme une entité pure à la base et qui est finalement corrompue et contaminé par la société (une peste!). À mon gré on n’a pas les instruments conceptuels pour définir d’une manière absolue ce qui est l’être humain; on peut prétendre le faire, bien sur, mais cette entreprise m’évoque une profonde méfiance car elle vise à justifier un quelconque ordre de choses (soit actuel ou futur; peut être c’est ça l’anarchie après tout). Des concepts tels que désir, liberté, enfance, sauvage ou création ont une allure si pure et universelle lorsque l’on les projette vers l’avenir; mais si l’on regarde vers le passé on se rend compte qu’ils sont nés autour d’une pourriture a fuir comme la peste!

    En fin de compte, après avoir éprouvé une foi quasi religieuse dans l’anarchie, je vois qu’elle n’est qu’une proposition, parmi bcp d’autres, que la société fait pour continuer a se reproduire sans aucun risque. Ceux qui sont situés aux extrêmes, ceux appelés les plus radicaux ne mettent en aucun danger la société, mais ils le donnent les racines pour qu’elle se maintienne debout. Cette civilisation trouvera son effondrement, c’est clair, mais ce ne sera pas le résultat d’un travail délibéré ni d’une armée révolutionnaire qui viendra nous sauver.

    « …le prochain bouleversement de la sensibilité ne peut plus se concevoir sur le plan d’une expression inédite de faits connus, mais sur le plan de la construction consciente de nouveaux états affectifs »

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