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Qu’est-ce que l’anarchisme ?

Une réponse qui en vaut la peine: celle de Hakim Bey, auteur de la célébrissime Zone d’autonomie temporaire.

ANARCHIE !!!

Le Prophète Mahomet a dit que tous ceux qui vous saluent par «Salam!» (paix) doivent être considérés comme musulmans. De la même manière, tous ceux qui s’appellent eux-mêmes «anarchistes» doivent être considérés comme des anarchistes (à moins qu’ils ne soient des espions de la police) – c’est-à-dire, qu’ils désirent l’abolition du gouvernement. Pour les soufis, la question «Qu’est-ce qu’un musulman?» n’a absolument aucun intérêt. Ils demandent, au contraire, «Qui est ce musulman? Un dogmatique ignorant? Un coupeur de cheveux en quatre? Un hypocrite? Ou bien est-ce celui qui tend à expérimenter la connaissance, l’amour et la volonté comme un tout harmonieux?»

«Qu’est-ce qu’un anarchiste?» n’est pas la bonne question. La bonne question c’est: «Qui est cet anarchiste? Un dogmatique ignorant? Un coupeur de cheveux en quatre? Un hypocrite? Celui-là qui proclame avoir abattu toutes les idoles, mais qui en vérité n’a fait qu’ériger un nouveau temple pour des fantômes et des abstractions? Est-ce celui qui essaye de vivre dans l’esprit de l’anarchie, de ne pas être dirigé / de ne pas diriger – ou bien est-ce celui qui ne fait qu’utiliser la rébellion théorique comme excuse à son inconscience, à son ressentiment et à sa misère?»

Les querelles théologiques mesquines des sectes anarchistes sont devenues excessivement ennuyeuses. Au lieu de demander des définitions (des idéologies), posez la question: «Qu’est-ce que tu sais?», «quels sont tes véritables désirs?», «que vas-tu faire à présent?» et, comme Diaghilev le dit au jeune Cocteau: «Étonne-moi!»

Qu’est-ce que le gouvernement?

Le gouvernement peut être décrit comme une relation structurée entre les êtres humains par laquelle le pouvoir est réparti inégalement, de telle manière que la vie créatrice de quelques-uns est réduite pour l’accroissement de celle des autres. Ainsi, le gouvernement agit dans toutes les relations dans lesquelles les intervenants ne sont pas considérés comme des partenaires à part entière agissant dans une dynamique de réciprocité. On peut ainsi voir à l’œuvre le gouvernement dans des cellules sociales aussi petites que la famille ou «informelles» comme les réunions de voisinage – là où le gouvernement ne pourra jamais toucher des organisations bien plus grandes comme les foules en émeute ou les rassemblements de passionnés par leur hobby, les réunions de quaker ou de soviets libres, les banqueteurs ou les œuvres de charité.

Les relations humaines qui s’engagent sur un tel partenariat peuvent, au travers d’un processus d’institutionnalisation, sombrer dans le gouvernement – une histoire d’amour peut évoluer en mariage, cette petite tyrannie de l’avarice de l’amour ; ou bien encore une communauté spontanée, fondée librement afin de rendre possible une certaine manière de vivre désirée par tous ses membres, peut se retrouver dans une situation où elle doit gouverner et exercer une coercition à l’encontre de ses propres enfants, au travers de règles morales mesquines et des reliquats d’idéaux autrefois glorieux.

Ainsi, la tâche de l’anarchie n’est jamais destinée à perdurer qu’à court terme. Partout et toujours les relations humaines seront concrétisées par des institutions et dégénéreront en gouvernements. Peut-être que l’on pourrait soutenir que tout cela est «naturel»… Mais quoi? Son opposé est tout aussi «naturel». Et s’il ne l’était pas, alors on pourrait toujours choisir le «non-naturel», l’impossible.

Cependant, nous savons que les relations libres (non gouvernées) sont parfaitement possibles, car nous en faisons l’expérience assez souvent – et plus encore lorsque nous luttons pour les créer. L’anarchiste choisit la tâche (l’art, la jouissance) de maximiser les conditions sociales afin de provoquer l’émergence de telles relations. Puisque c’est ce que nous désirons, c’est ce que nous faisons.

Et les criminels ?

Les considérations ci-dessus peuvent être comprises comme impliquant une forme d’«éthique», une définition mutable de la justice dans un contexte existentiel et situationniste. Les anarchistes ne devraient probablement considérer comme «criminels» que ceux qui contrarient délibérément la réalisation des relations libres. Dans une société hypothétique sans prison, seuls ceux que l’on ne peut dissuader de telles actions pourront être livrés à la «justice populaire» ou même à la vengeance.

Aujourd’hui, cependant, nous ferions bien de réaliser que notre propre détermination à créer de telles relations, même de manière imparfaite et utopique, nous placera inévitablement dans une position de « criminalité » vis-à-vis de l’État, du système légal et probablement de la «loi non écrite» du préjugé populaire. Depuis longtemps être un martyr révolutionnaire est passé de mode – le but présent est de créer autant de liberté que possible sans se faire attraper.

Comment fonctionne une société anarchiste ?

Une société anarchiste œuvre, partout où deux ou plusieurs personnes luttent ensemble, dans une organisation de partenariat original, afin de satisfaire des désirs communs (ou complémentaires). Aucun gouvernement n’est nécessaire pour structurer un groupe de potes, un dîner, un marché noir, un tong (ou une société secrète d’aide mutuelle), un réseau de mail ou un forum, une relation amoureuse, un mouvement social spontané (comme l’écosabotage ou l’activisme anti-SIDA), un groupe artistique, une commune, une assemblée païenne, un club, une plage nudiste, une Zone Autonome Temporaire. La clé, comme l’aurait dit Fourier, c’est la Passion – ou, pour utiliser un mot plus moderne, le désir.

Comment pouvons-nous y parvenir? En d’autres termes, comment maximiser la potentialité que de telles relations spontanées puissent émerger du corps putrescent d’une société asphyxiée par la gouvernance? Comment pouvons-nous desserrer les rênes de la passion afin de recréer le monde chaque jour dans une liberté originelle du «libre esprit» et d’un partage des désirs? Une question à deux balles – et qui ne vaut réellement pas beaucoup plus puisque la seule réponse possible ne relève que de la science-fiction.

Très bien. Mon sens de la stratégie tend vers un rejet des vestiges des tactiques de l’ancienne «Nouvelle Gauche» comme la démo, la performance médiatique, la protestation, la pétition, la résistance non-violente ou le terrorisme aventurier. Ce complexe stratégique a été depuis longtemps récupéré et marchandisé par le Spectacle (si vous me permettez un excès de jargon situationniste).

Deux autres domaines stratégiques, assez différents, semblent bien plus intéressants et prometteurs. Le premier est le processus résumé par John Zerzan dans Elements of Refusal – c’est-à-dire, le refus de mécanismes de contrôle étendus et largement apolitiques inhérents aux institutions comme le travail, l’éducation, la consommation, la politique électorale, les «valeurs familiales», etc. Les anarchistes pourraient tourner leur attention vers des manières d’intensifier et de diriger ces « éléments ». Une telle action pourrait bien tomber dans la catégorie traditionnelle de l’«agitprop», mais éviterait la tendance «gauchiste» à institutionnaliser ou «fétichiser» les programmes d’une élite ou avant-garde révolutionnaire autoproclamée.

L’action dans le domaine des «éléments du refus» est négative, «nihiliste» même, tandis que le second secteur se concentre sur les émergences positives d’organisations spontanées capables de fournir une réelle alternative aux institutions du Contrôle. Ainsi, les actions insurrectionnelles du «refus» sont complétées et accrues par une prolifération et une concaténation des relations du «partenariat original». En un sens, c’est là une version mise à jour de la vieille stratégie wobbly d’agitation en vue d’une grève générale tout en bâtissant simultanément une nouvelle société sur les décombres de l’ancienne au travers de l’organisation des syndicats. La différence, selon moi, c’est que la lutte doit être élargie au-delà du «problème du travail» afin d’inclure tout le panorama de la «vie de tous les jours» (dans le sens de Debord).

J’ai essayé de faire des propositions bien plus spécifiques dans mon essai Zone Autonome Temporaire (Autonomedia, NY, 1991) ; donc, je me restreindrai ici à mentionner mon idée que le but d’une telle action ne peut être désigné proprement sous le vocable de «révolution» — tout comme la grève générale, par exemple, n’était pas une tactique «révolutionnaire», mais plutôt une «violence sociale» (ainsi que Sorel l’a expliqué). La révolution s’est trahie elle-même en devenant une marchandise supplémentaire, un cataclysme sanglant, un tour de plus dans la machinerie du Contrôle – ce n’est pas ce que nous désirons, nous préférons laisser une chance à l’anarchie de briller.

L’anarchie est-elle la Fin de l’Histoire ?

Si le devenir de l’anarchie n’est jamais «accompli» alors la réponse est non – sauf dans le cas spécial de l’Histoire définie comme auto-valorisation privilégiée des institutions et gouvernements. Mais, l’histoire dans ce sens est déjà probablement morte, a déjà «disparu» dans le Spectacle, ou dans l’obscénité de la Simulation. Tout comme l’anarchie implique une forme de «paléolithisme psychique», elle tend traditionnellement vers un état post-historique qui refléterait celui de la préhistoire. Si les théoriciens français ont raison, nous sommes déjà entrés dans un tel état. L’histoire comme l’histoire (dans le sens de récit) continuera, car il se pourrait que les humains puissent être définis comme des animaux racontant des histoires. Mais l’Histoire, en tant que récit officiel du Contrôle, a perdu son monopole sur le discours. Cela devrait, sans aucun doute, travailler à notre avantage.

Comment l’anarchie perçoit-elle la technologie ?

Si l’anarchie est une forme de « paléolithisme », cela ne signifie nullement que nous devrions retourner à l’Âge de la pierre. Nous sommes intéressés par un retour au Paléolithique et non en lui. Sur ce point, je crois que je suis en désaccord avec Zerzan et le Fifth Estate [3] ainsi qu’avec les futuro-libertariens de CaliforniaLand. Ou plutôt, je suis d’accord avec eux tous, je suis à la fois un luddite et un cyberpunk, donc inacceptable pour les deux partis.

Ma croyance (et non ma connaissance) est qu’une société qui aurait commencé à approcher une anarchie générale traiterait la technologie sur la base de la passion, c’est-à-dire, du désir et du plaisir. La technologie de l’aliénation échouerait à survivre à de telles conditions, alors que la technologie de l’amélioration survivrait probablement. La sauvagerie, cependant, jouerait aussi nécessairement un rôle majeur dans un tel monde, car la sauvagerie est le plaisir. Une société basée sur le plaisir ne permettra jamais à la techné d’interférer avec les plaisirs de la nature.

S’il est vrai que toute techné est une forme de médiation, il en va de même de toute culture. Nous ne rejetons pas la médiation per se (après tout, tous nos sens sont une médiation entre le «monde» et le «cerveau»), mais plutôt la tragique distorsion de la médiation en aliénation. Si le langage lui-même est une forme de médiation alors nous pouvons « purifier le langage de la tribu » ; ce n’est pas la poésie que nous haïssons, mais le langage en tant que contrôle.

Pourquoi l’anarchie n’a-t-elle pas marché auparavant ?

Qu’est-ce que vous voulez dire par là ? Elle a marché des milliers, des millions de fois. Elle a fonctionné durant 90 % de l’existence humaine, le vieil Âge de la pierre. Elle marche dans les tribus de chasseurs/cueilleurs encore aujourd’hui. Elle marche dans toutes les « relations libres » dont nous avons parlé auparavant. Elle marche chaque fois que vous invitez quelques amis pour un piquenique. Elle a « marché » même dans les « soulèvements ratés » des soviets de Munich ou de Shanghai, de Baja California en 1911, de Fiume en 1919, de Kronstadt en 1912, de Paris en 1968. Elle a marché pour la Commune, les enclaves de Maroons, les utopies pirates. Elle a marché dans les premiers temps du Rhodes Island et de la Pennsylvanie, à Paris en 1870, en Ukraine, en Catalogne et en Aragon.

Le soi-disant futur de l’anarchie est un jugement porté précisément par cette sorte d’Histoire que nous croyons défunte. Il est vrai que peu de ces expériences (sauf pour la préhistoire et les tribus primitives) ont duré longtemps – mais cela ne veut rien dire quant à la valeur de la nature de l’expérience, des individus et des groupes qui vécurent de telles périodes de liberté. Vous pouvez peut-être vous souvenir d’un bref, mais intense amour, un de ces moments qui aujourd’hui encore donne une certaine signification à toute votre vie, avant et après – un « pic d’expérience ». L’Histoire est aveugle à cette portion du spectre, du monde de la « vie de tous les jours » qui peut aussi devenir à l’occasion la scène de l’« irruption du Merveilleux ». Chaque fois que cela arrive, c’est un triomphe de l’anarchie. Imaginez alors (et c’est la sorte d’histoire que je préfère) l’aventure d’une importante Zone Autonome Temporaire durant six semaines ou même deux ans, le sens commun de l’illumination, la camaraderie, l’euphorie – le sens individuel de puissance, de destinée, de créativité. Aucun de ceux qui ont jamais expérimenté quelque chose de ce genre ne peut admettre, un seul moment, que le danger du risque et de l’échec pourrait contrebalancer la pure gloire de ces brefs moments d’élévation.

Dépassons le mythe de l’échec et nous sentirons, comme la douce brise qui annonce la pluie dans le désert, la certitude intime du succès. Connaître, désirer, agir – en un sens nous ne pouvons désirer ce que nous ne connaissons déjà. Mais nous avons connu le succès de l’anarchie pendant un long moment maintenant – par fragments, peut-être, par flashes, mais réel, aussi réel que la mousson, aussi réel que la passion. Si ce n’était pas le cas, comment pourrions-nous la désirer et agir peu ou prou à sa victoire?

*  *  *

(Pour d’autres traductions de Hakim Bey, rendez-vous sur Kasophorus.)

Catégories :Accès de rage

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Anne Archet

Héroïne sans emploi, pétroleuse nymphomane, Pr0nographe lubrique, anarcho-verbicruciste, poétesse de ses fesses, Gîtînoise terroriste (et menteuse, par dessus le marché). Si j'étais vous, je me méfierais, car elle mord jusqu'au sang.

33 réponses

  1. Eh ! intéressant, c’est un peu ce que font depuis plus de trois ans maintenant les ZADistes de NDL, avec parfois quelques heurts c’est vrai – mais inévitable- mais aussi beaucoup de réussite.

    L’anarchie, c’est aussi d’abord faire primer l’égalité sur la liberté, car une liberté trop libre conduit inéluctablement à une dictature. Cela me rappelle les quelques lignes éminemment perfectibles parce que précisément trop dirigistes, que j’avais jetées ici.
    http://bab007-babelouest.blogspot.fr/2012/12/une-utopie-exigeante-et-enrichissante.html

  2. « Eh ! intéressant, c’est un peu ce que font depuis plus de trois ans maintenant les ZADistes de NDL, avec parfois quelques heurts c’est vrai – mais inévitable- mais aussi beaucoup de réussite. »

    Mais justement, la ZAD n’est pas une Zone d’autonomie temporaire.

    Quelques bannières et affiches dans la ZAD se lisaient clairement comme Zone d’autonomie DÉFINITIVE, et le fait que les gens de la zone luttent depuis des années pour y rester et même y faire une vie, ou une tranche de vie qui se perpétue, est la preuve même que ça dépasse de loin le temporaire.

    Hakim Bey est un anarcho-hippie, qui défend la Commune partielle, l’occupation provisoire et limitée, l’action offensive symbolique… du libéralisme militant, quoi. Et peut-être pas si anarchiste que ça, en fait, vu comment il s’est imposé comme une sommité intellectuelle de la « philosophie anarchiste » durant un temps, et faisait affaire avec un certain establishment académique. On peut voir dans Occupy et non dans la ZAD, le dernier effort de réalisation d’une Zone d’autonomie temporaire.

    Ce serait bien aussi (et je dis ça sans aucune aigreur) qu’Anne nous donne son opinion de la défense ouverte de la pédophilie par Hakim Bey, car ça semble avoir longtemps été un sacré tabou (et un tabou sacré) parmi les milieux anarchites nord-américain…

    Mais pour l’idée de la TAZ, j’ai toujours eu un problème avec ça. Tout autonomie qui ne se veut que temporaire est compromise par son propre auto-défaitisme, qui limite les volontés de vouloir faire durer, persister, au-delà des despotismes policiers de l’État.

    Je crois que si on veut vraiment contribuer à renverser la société autoritaire dans laquelle on est, ce serait mieux d’essayer de créer des zones d’autonomies permanentes (ou « défitinives »), plutôt que de branler dans le manche -et se branler le manche aussi- dans des demi-efforts pour des fractions de victoires qui ne durent pas de toute façon, et n’en viennent jamais à en envahir, corrompre la trame de l’existant du social. L’empire exerce son monopole en imposant ses formes de vie de façon récurrente et mécanique, or on ne peut que le renverser sur le long terme, et pas avec de petits efforts pas trop dérangeants faciles à étouffer et faire oublier.

  3. J’ai oublié ce détail… « Zone À Défendre », c’est aussi l’autre appellation plus utilisée de l’acronyme, qui suggère tout autant une volonté de permanence.

  4. Merci Vlad ! Et j’espère que nos efforts vont apporter la grande foule dans une quinzaine, le onze mai autour de la ZAD. Ce jour-là elle s’élargira en TAZ, bien plus vaste, puisque tout le secteur appartiendra pour quelques heures à l’organisation, de NDL à La Paquelais et Vigneux.

  5. Vlad et Badelouest, vous n’avez pas lu l’article ou quoi ?! Vous tombez exactement dans ce qu’il essaye d’anticiper et conjurer, savoir « les querelles théologiques mesquines des sectes anarchistes. »

    Loin de moi l’idée de vous dire ce qu’il faut faire ou lire ou comprendre. Je vous dirai juste : relisez l’article.

    Les zones d’autonomies permanentes sont des Etats, ce que Madame Archet appelle des gouvernements, et même si elles émergent d’une volonté anarchiste, elles se transformeront un jour en corps politique figé. En tout cas voilà ce que moi j’ai lu dans l’article et je partage ce point de vue.

    Pour la ZAD, je pense qu’il y a un combat à remporter mais une fois remporté, il n’y a pas de bonne raison d’y rester. Pas plus à cet endroit qu’ailleurs en tout cas. Vivre autrement et comme chacun le souhaite est un combat quotidien, individuel plus que collectif, doit se faire partout et nulle part.

    Pour arrêter de penser comme l’Etat, il faut ne plus considérer l’Etat, l’oublier, contrecarrer ainsi son omniprésence symbolique. Il faut aussi éviter d’utiliser des acronymes comme ZAD, TAZ, etc. Ces techniques textuelles sont typiques de la pensée technocratique d’ETAT.

  6. Pour moi l’État est une aberration. Je l’ai suffisamment souligné dans mon manifeste, certainement très perfectible et surtout modulable. Tout est nécessairement fluctuant, adaptable, exactement comme la Nature sait le faire. De ma part il s’agissait seulement d’idées à configurer selon des sols et des habitants tous différents.

    Oui, cela risque de n’être pas aussi favorable à l’expansion de l’espèce homo sapiens. Je pense que c’est un bien. D’autres vont se récrier. C’est normal. « Croissez, multipliez-vous » est une phrase écrite dans un certain contexte, qui est périmé depuis longtemps. On oublie de le dire. L’équilibre de la nature, tôt ou tard, se régularise. Ce qui n’est pas une raison pour servir de prétexte à des mesures manifestement malthusianistes comme l’interdiction religieuse du port de préservatif avec le SIDA en bout de piste ou l’imposition de « vaccins » qui au bout du compte stérilisent les femmes. ou pire, comme les guerres à coups d’uranium dit « appauvri ».

  7. Bonjour,
    A mon avis le vrai piège c’est justement de chercher à rendre durable -voire définitif- ce qui ne demande qu’à évoluer -et qui nous/vous échappera de toutes façons.
    La persistance c’est la condition fondamentale -nécessaire- de la société. C’est comme ça (ou POUR ça) qu’on établit des règles, qu’on invente des normes, qu’on rédige des lois : pour que les générations les reprennent, les unes après les autres, sans les remettre en question. Pour que la structure dure.
    La récurrence, la persistance, la permanence; l’héritage, la Tradition, le Patrimoine… « Fils, nous nous sommes battus pour cette terre. Maintenant, elle est à toi : à ton tour, bats-toi. »

    Libérer des espaces pour mieux les grillager? Super! Les anars font du Zonage. Les anars protègent leurs terres. « Vous rentrez dans une Zone Anar. Chasse interdite: soyez végétarien ».
    Zone Anarchiste Dogmatique = Zone Autoritaire Débile.

  8. Tu dois être sévèrement con, l’Eunuque, pour dire des choses comme ça, ou au mieux t’es désinformé. Dans les deux cas tu ne fais que répandre des informations fausses.

    La défense de la ZAD, c’est contre l’État et ses forces militaires, pas contre les gens. En fait des milliers de gens de toutes sortes qui veulent y donner un apport ont été accueillis durant des mois, des années. Pas pour rien que ce sont des bars et des tables à diner qu’on trouve sur les chicanes à l’entrée de la ZAD. Les zadistes s’en foutent de comment chacun-e y vit, et aucune Loi ni séparation n’est imposée dans la zone. Les routes sont détruites et les gens vont où ils-elles veulent avec qui ils-elles veulent.

    Ça, c’est la liberté, pas votre abstraction despotiques de bureaucrates, vos condos et vos développenents qui n’arrêtent de formater le Vivant.

    Gianni:
    « Pour la ZAD, je pense qu’il y a un combat à remporter mais une fois remporté, il n’y a pas de bonne raison d’y rester. »

    Quand, ça, c’est « remporté »? C’est une lutte permanente, où ne peut que progresser ou reculer, pas un match de foot ou une élection. Semble-t-il qu’actuellement l’État s’est retiré de la ZAD, temporairement, mais les terres restent dans les poches de Vinci, qui est légalement propriétaire de la plupart des terres de la zone de l’aéroport.

    Et puis après, si c’est une zone libérée, donc pourquoi pas se la réapproprier pour créer une vie que la société nous empêche ailleurs?

    De pas vouloir faire durer l’autonomie c’est rien d’autre que de laisser la société autoritaire gagner dans sa domination. C’est le problème central que je vois avec l’idée de la « TAZ ».

    Exactement ce qui se passera si les zadistes quittent la zone en passant que tout est gagné. Vinci reprendra son fief et tassera la poignée de marginaux qui tentaient encore d’y vivre librement. Car la corporation est déjà légalement propriétaire d’une grande partie de la ZAD.

    La meilleure chose à faire pour la ZAD, c’est de continuer de la répandre… ce qui est d’ailleurs en train de se faire par les zadistes et leurs supporteurs. Si un mode fonctionne, alors tu le répands, et celui-ci est basé, de façon évidente, sur la solidarité et la liberté.

    Vive la diversité des tactiques!

  9. Babelouest, la terre dans la ZAD, comme toute autre zone libérée des despotismes d’État, appartient à tout le monde qui y font fleurir la vie, pas aux fantômes morts que sont les organisations avec des acronymes et des logos. Du moins dans le concret. À l’exception des rares paysans qui détiennent encore du terrain, s’il y en a.

    L’effort du 11 mai semble être une bonne chose, mais faites juste pas chier les autres zadistes qui pensent pas comme vous, ok?

  10. @ anabraxas
    Bien d’accord, si on n’avance plus, on recule. Rien n’est jamais tout gagné, les types de Vinci ou de Monsanto ont la même mentalité que les maîtres de forges du XIXe, que les légitimistes copains de Charles X, que les hordes de Pizarre, de Cortès, que les anglais qui ont envahi l’Amérique du nord, que le colonialiste Jules Ferry, que tous ces types qui pressuraient et ne faisaient rien autrefois.

  11. @ vladnihilum
    Pas du tout l’intention de faire chier quelqu’un, Vlad. Je faisais simplement remarquer que, pour les besoins de la cause, la zone défendue sera provisoirement bien plus grande puisqu’elle englobera des villages limitrophes. La manifestation terminée, la ZAD pourra continuer à fonctionner selon les désirs de ses habitants, que nous « envahirons » un peu sur le pourtour pendant quelques heures. Sans toucher à leur intimité.

    D’ailleurs, quand je suis venu à la ZAD, je suis resté très discret à chaque fois.

  12. Vlad N : « (…) tu ne fais que répandre des informations fausses. »
    J’ai rien répandu du tout (tdc); en tt cas pas d’info sur la ZAD de NDDL (d’ailleurs c’est pas le sujet du texte ci-dessus, si?).
    Pour info, les zones d’autonomie c’est pas nouveau et y’en a plein, à commencer par les squats.
    Mais à mon avis, la pérennisation (tout comme la DEFENSE territoriale) tend souvent à transformer un « lieu libre et ouvert » en une « zone exclusive (ou sélective) et fermée/renfermée sur elle-même ». Voire de mener au communautarisme (« nous, entre nous, à l’intérieur » vs « les autres, contre nous, à l’extérieur »).
    C’est en tout cas un risque, et après tout, « l’autonomie » peut très bien légitimer une direction « gouvernementale » (dans le sens donné ci-dessus). C’est historique? Ah, oui, peut-être…

  13. Chère Anne,

    Pourrais-tu clarifier ce que tu entends par « technologie de l’amélioration » ? Merci !

  14. A mon sens, si « anarchie » (sans « isme ») veut rimer avec liberté, il doit se conjuguer au présent du singulier;
    Seuls les « libertaires individualistes » peuvent à mon sens se revendiquer de l’anarchie façon anarque, sans contraintes venant des autres, et sans soi même en imposer aux autres, par « principe de réciprocité », et laisser libre chacun et chaque être, implique donc le respect mutuel, et l’absence de pouvoir ou d’obligations (venant d’autres que soi);
    Et si en plus il s’agit d’être éco-libertaire individualiste (proche de l’anarchisme vert ou écologiste) alors ce même principe de respect de la liberté, est appliqué non seulement dans l’espèce humaine, mais dans toutes, et envers tous les êtres vivants, toutes formes de vie, quelle qu’elle soit;
    Mais la liberté, si elle est authentique, est comme le vent, ou le ciel, elle ne peut se laisser enfermer dans aucune définition, par aucun mot, dans aucune institution, groupement, parti, société ou communauté;
    Et vouloir « imposer l’anarchie » ou vouloir en faire un mode de vie, c’est déjà tuer l’anarchie, qui comme l’esprit libre et imprévisible, changeant comme toutes choses dans l’univers, ne peut jamais être saisi,ou figé par des lois, des idéologies, des murs, des textes, etc;

  15. Personnellement, puisque chacun a ses visions, je me revendique non comme libertaire, mais comme égalitaire puisque seule l’égalité peut canaliser la trop grande liberté de certains envers la liberté d’autres (entre autres celle de certains hommes envers des femmes, même s’ils n’en ont pas vraiment conscience).

    C’est pourquoi élaborer ensemble quelques règles de base, minimalistes mais essentielles, est une condition de la relative pérennité de la vie en communauté. A moins de vivre seul au fond des bois.

    Je sais, je connais des libertaires qui n’acceptent ces genres de contraintes. Qui a tort, qui a raison ?

  16. L’égalité est une utopie sur terre, aucun être (humains ou autre) n’est égal à un autre, dès sa naissance, que ce soit physiquement, d’esprit, en capacitées etc;
    Attention à ne pas faire de l’égalité une sorte de nivellement où on devrait aplanir les tetes qui dépassent ! le communisme a eu aussi ses dérives, dictatures etc;
    A mon sens, la valeur qui rime le plus avec liberté, c’est respect;
    Respect des autres, respect physique et moral : ne pas s’empiffrer et accumuler du fric par cupidité quand d’autres crévent sous les ponts fait aussi parti du respect
    La fraternité est alors possible aussi;
    L’égalité en valeur des êtres, est une chose essentielle aussi, toute vie vaut une autre vie; personne n’est superieur ou inferieur à un autre dans l’absolu; tous naissent, vivent, puis meurent;
    Il n’y a pas par contre vraiment d’égalité hommes-femmes de nos jours, certains hommes ne les respectent pas, ce n’est qui injuste,mais inversement certaines femmes « profitent » du système, des relations entre autre, collectionnent souvent, etc, parfois bien plus souvent que certains hommes, qui peuvent etre honnêtes, mais qui sont parfois exclus à ce niveau; « Loi de l’offre et la demande » souvent; L’inégalité peut exister partout; Il n’y déjà pas d’égalité entre un humain(e) qui mange son plat, et l’être vivant mort dans son assiette, qui lui aussi aurait aimé garder sa vie, vivre libre, ne pas souffrir, et être respecté…/.

  17. On parle là d’égalité en droits et en devoirs : tous égaux, tous différents. Même les capacités ne sont pas au-dessus, ou en-dessous, mais différentes. Le très doué n’a pas forcément plus de mérite que celui qui va faire beaucoup d’efforts (mais au contraire, moins peut-être).

  18. Je me considère surtout éco-libertaire, et je pense que le simple fait de vivre en couple (et pire encore faire des mioches) est le contraire d’une action et d’un choix libertaire;
    La vie de couple (union libre de façon moindre, ou pire mariage) n’est pas la liberté, elle comporte pas mal de contraintes, compromissions, concesssions, efforts constants pour cohabiter, avec celui ou celle que l’on « désire », et à part la « liberté » de choix pour certains pour pouvoir satisfaire ses pulsions sexuelles (et affectives des fois) et copuler comme n’importequ’elle macaque, chien(ne), vache, rats, cochon etc, il faut payer le prix de ces petits plaisirs, par une aliénation de notre esprit et de notre liberté;
    Mais beaucoup n’ont pas le courage de vivre seuls et libres;
    Engendrer une progéniture comporte aussi toutes sortes de contraintes, pertes de liberté personnelles, engagements, dépendances, etc, qui vont à l’encontre des choix anarchistes, de vie libre et personnelle;

    Et au niveau écologie libertaire, je pense que sur une planète déjà bien trop surpeuplée d’humains (ce primate cupide, arrogant et avide qui a mal tourné) c’est une folie de vouloir encore faire des gamins sur terre; Je n’ai rien contre les enfants, mais 7 milliards, chiffre qui risque de doubler dans pas si longtemps, c’est non seulement signer l’arret de mort pour une planète déjà pas mal polluée, détruite, et où la vie risque de disparaitre si « l’homoeconomicus » n’arrete pas;
    Voire à ce sujet le (très bon) livre d’Yves paccalet , naturaliste et écologiste (« l’humanité disparaitra, bon débarras ! »)

    Si on veut être à la hauteur de ses convictions sans tenir un double discours, mais chacun assume ou non ses contradictions…
    ;)

  19. J’espère ne pas être le seul à se demander pourquoi il n’y a plus de mouvement sur le blog… Anne Archet est-elle en prison ? a-t-elle décidé de tout arrêter ?

  20. Nan. C’est l’été, il fait chaud, je consacre toutes mes énergies à maintenir ma température corporelle à un niveau acceptable. I am the lizzard queen.

  21. Tant mieux alors. Sur le coup j’ai vraiment pensé que vous étiez dans les ennuis…Portez-vous bien Anne Archet.

  22. Anne, je te conseille de lire ces 3 livres de Jacques Ellul, un fameux sociologue de la technique, aussi théologien et se disant anarchiste : La technique ou l’enjeu du siècle ; le système technicien ; le bluff technologique.

  23. C’est étonnant à quel point tout le monde semble avoir fait sien le mythe de «l’individu», fabrication bourgeoise libérale centrale dans les dispositifs de domination actuels.
    On n’aime pas trop les oppositions corps/esprit, bien/mal, humaines/nature, etc’, mais individu/collectif, ça, visiblement, on kiffe grave.
    Le reste du désastre en découle logiquement.

  24. Oui votre fameuse liberté individuelle (de philosopher, en tout cas) est rendue possible par un ensemble de conditions matérielles issue du travail insoutenable d’une partie de la planète plus asservie que nous, depuis l’extraction du lithium jusqu’à nos écrans, sans oublier ce qu’on bouffe, ce qui comble nos besoins de base…
    Tout s’éclairerait si chacun-e ici témoignait de ses propres oppressions (probablement déjà collective) et des bouquins qui vous ont permis d’en prendre conscience -et de philosopher autant.

    Personnellement j’ai des attitudes anarcho-individualistes parce que je me sens rapidement mal en groupe. Mais je sais aussi que pour avoir mon pti vélo recyclé, mon pti appart’ où je ne dérange personne, mes petites opportunités de rapports sexuels consentis ou tout simplement de marcher dans l’espace public… bref pour avoir toutes ces « brèches de liberté » il y a un arsenal d’activités asservissantes à mon service.

    La main-d’oeuvre planétaire subventionne nos masturbations anarco-intellectuelles.
    Nous sommes liés à jamais.
    Je retourne les voir ça sera plus instructif !

    J’avais espéré des anar-blogeurses 2018 les pieds sur terre. Je suis déçu :/
    Bonne continuation.

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