
On peut rêver
Ma blonde est en AG syndicale sur Zoom et j’entends son exécutif parler de « gains défensifs » quand la partie patronale n’a pas obtenu exactement ce qu’elle voulait.Voilà l’état actuel du mouvement ouvrier: quand quelque chose ne se produit pas, c’est un gain. Bientôt, si on obtient quelque chose en rêve, on va parler de gain onirique.
On peut encore rêver
J’ai rêvé que j’avais choisi la formule abonnement pour mes vêtements et qu’ils sont soudainement disparus quand l’essai gratuit s’est terminé et que ma carte n’a pas passé. Je me suis alors retrouvée nue alors que je volais à l’étalage à l’épicerie.
Critique de la critique
Critique de l’idéologie : tout est une construction. Critique idéologique avancée : le néant aussi est construit.
La nature de la vérité
Si l’art est le mensonge qui dit la vérité, l’esthétique est la vérité du mensonge et l’histoire de l’art, la vérité sur le mensonge.
La vérité, quant à elle, est que je resterai pauvre toute ma vie si je continue à faire de l’art.
Difficulté croissante
« Il est plus facile d’imaginer la fin du monde que la fin du capitalisme. » – Frederic Jameson
« Il est plus facile d’imaginer la fin du capitalisme que d’imaginer que je vais être capable de payer mon loyer et mon épicerie à moyen terme. » – Anne Archet
La sororité du crime
Moment de complicité avec une inconnue à l’épicerie cet après-midi. Nous avons été mutuellement témoins de nos vols à l’étalage respectifs et ne les avons soulignés que par des sourires entendus.
Debout, les cassées de la terre.
Négation et nihilisme
Évidemment qu’il y a une distinction entre la négation et le nihilisme. C’est juste qu’elle est fausse – et qu’elle n’a pas d’importance.
Pourquoi mes aphorismes sont médiocres
J’ai essayé d’inverser les clichés, mais tout ce que j’ai réussi, c’est de faire de l’inversion un cliché.
Sport de glisse
J’ai inventé un sport. Il consiste à pratiquer le sexe oral sur la brosse, ben stone et ben gelée. Ça s’appelle le curlinglingus.
Autre critique de la critique
Questionnez l’autorité !
Si vous le faites correctement, il y a de fortes chance que vous deveniez l’autorité !
Vous serez alors contraint·e de vous questionner vous-même et vous déciderez que toutes ces questionnements, ce n’est bon pour personne.
L’impensable
Observons une minute de silence pour que l’ineffable présente ses respects à l’inimaginable.
N’écrivez pas d’aphorismes quand vous êtes en peine d’amour
Comment trouver le bonheur ? Essayez de vous rappeler où vous l’avez vu la dernière fois et allez vérifier s’il y est encore. S’il n’est plus là, demandez-vous pourquoi il est parti. S’il y est encore, demandez-vous pourquoi vous n’êtes pas resté·e.
Gaspillage
Publier en format électronique m’a fait prendre conscience que livres ne sont pas un gaspillage de papier. Ils sont en réalité un gaspillage de mots.
Tant que je pourrai verrouiller une porte
Chaque fois que je paie mon loyer, je me dis «pas ce mois-ci, lumpenprolétariat».
Le coin de l’esthète
Tout est politique. Le reste est esthétique – mais ça aussi, c’est politique.
L’éternel retour du même meme
C’est en recevant les colis qu’il avait commandé sur Amazon alors qu’il était high que Nietzsche eut la révélation de l’éternel retour.
Lexique marxien
Pour mon anniversaire, quelqu’un m’a commandé un sex toy sur Amazon et ça m’a excitée grave.
C’est je crois ce que les marxistes appellent le fétichisme de la marchandise.
Lexique tout court
Si un jour je deviens lexicographe, je classerai les mots dans mon dictionnaire en cinq catégories : ceux qui m’ont séduite, ceux qui m’ont trahie, ceux qui m’ont blessée, ceux qui m’ont réconfortée et ceux qui sont restés lettre morte.
Le jour où j’ai pris les changements climatiques au sérieux
Jamais n’ai-je autant été surprise par des pluies soudaines et diluviennes alors que je fornique dans les buissons. Les changements climatiques sont en train de ruiner mes amours estivales.
Vous savez laquelle
Rassurez-vous, il y a une raison pourquoi tout va si mal. C’est juste que c’est une très mauvaise raison.
Le style et l’oral
Le style littéraire est une chose bien étrange. Je suis capable de le reconnaître chez les autres au point de pouvoir les parodier. Je suis toutefois incapable de reconnaître le mien.
J’en viens à me dire que le style est comme la mauvaise haleine : je n’arrive pas à croire que j’en ai tant que personne ne me le fait remarquer.
Les temps sont durs pour les provocatrices
J’ai décidé il y a des années d’écrire des livres réservés aux adultes, en me disant que c’était la meilleure façon de choquer et d’avoir l’honneur – non, le privilège – de me faire bannir et censurer. Si j’avais su que c’est par les livres pour enfants que le scandale arrive, je ne me serais pas fendu le cul à écrire autant d’obscénités.
Ode à l’ennemi
L’ennemi ne se présente pas à pied à la frontière, il vous fait travailler pour un salaire de misère. L’ennemi ne lit pas des contes à vos enfants en portant une robe, il paie des chroniqueurs orduriers pour s’assurer que vous serez exploité jusqu’à la fin de vos jours.
L’ennemi ne prie pas dans la rue, il hausse les loyers jusqu’à ce que vous soyez forcé d’y vivre. L’ennemi ne manifeste pas sur les campus universitaires, il s’enrichit en vous vendant à prix d’or ce dont vous avez besoin pour rester en vie.
L’ennemi ne troque pas du sexe contre de l’argent, il appuie et finance un génocide. L’ennemi ne vous traite pas de raciste, il laisse les usines d’entreprises transnationales vous empoisonner pour qu’elles terminent le trimestre avec des profits à la hausse.
L’ennemi n’est pas celui ou celle qui lutte pour mettre fin à sa propre oppression, il est celui qui vous écrase face contre terre jusqu’à votre dernier souffle, avant que tout ne s’effondre et que l’océan nous engloutisse.
Catégories :Grognements cyniques
Anne Archet
Héroïne sans emploi, pétroleuse nymphomane, Pr0nographe lubrique, anarcho-verbicruciste, poétesse de ses fesses, Gîtînoise terroriste (et menteuse, par dessus le marché). Si j'étais vous, je me méfierais, car elle mord jusqu'au sang.
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